Une maison aux marges de la ville, dans une petite clairière, juste à l’écart d’une piste forestière sinueuse. C’est là que nous vivons. Une maison inondée de lumière et de livres. Beaucoup de lumière, beaucoup de livres et de la nature tout autour. Ça ne date pas d’hier, ce besoin d’écrin, de refuge, ce besoin de pages tournées, retournées, d’histoires à raconter, à partager. Mes enfants ont connu ça très tôt, cette immersion-là. Comme un cocon au creux des jours : des histoires pour s’endormir, La planète bizarre – un lieu où il pleut des saucisses -, La sorcière Sorciflette a perdu ses lunettes, mais aussi des histoires trouvées à la bibliothèque : excitation face à la profusion, albums, romans, bandes dessinées, s’installer, tourner les pages, lire et rêver.
Je crois avoir mis ce qu’il faut de joie, de ferveur et de liberté face à tout cela. Et pourtant, je constate qu’aujourd’hui, ils ne lisent pas. Ils ont 16 et 18 ans et n’ont pas ce besoin-là, pas ce besoin d’heures légères ou graves absorbées par les mots, pas d’envie évidente de ces grandes plongées qui nous font tout oublier. Je suis triste de cela, bien évidemment. Mais je crois qu’il n’y a pas d’explication véritable. Je crois aussi qu’il ne faut pas en chercher. En nous, tant d’élans restent sans écho, tant de nos passions ne leur parlent pas. C’est ainsi.
Oui, éternel refrain : semer sans savoir ce que nous allons récolter, offrir sans espérer de retour. Métier de parent, métier d’humilité. Et ça aussi, c’est une histoire que nous pouvons écrire pour que d’autres la lisent.