C’est le cœur de l’été. Ma jeune sœur va mettre un enfant au monde. C’est son premier. Elle l’espère depuis longtemps. Au moment de naître, tout arrive très vite. Il y a la lumière d’abord puis c’est l’ombre qui s’abat. Adam ne pleure pas. Son cordon ombilical l’empêche de respirer. Adam perd connaissance. Son cœur s’arrête. Il doit être réanimé. On ne sait pas s’il va vivre. Les heures qui passent sont noires. Chaque jour, plusieurs textos me tiennent informé. Trop de sanglots dans la voix empêche de parler. Dans la tourmente du choc, peur et pleurs envahissent tout. Adam est branché de partout. Des machines lui donnent l’air dont il a besoin. Après des jours aux entrailles tordues, les médecins annoncent qu’Adam va vivre. Il est hagard, peu réactif, mais le prendre enfin dans les bras donne grand courage. C’est ce que ma sœur me dit. Elle me dit aussi les chambres d’hôpitaux, son époux costaud, l’allaitement qui exige tant, et nos parents à nous, désemparés, immobiles. J’entends tous ses espoirs et ce qu’elle ne veut pas voir, ce qu’elle ne peut pas envisager. Que son enfant garde trace de cette naissance violente. Je ne peux pas fendre son armure. Je l’écoute. Après quelques semaines, des examens neurologiques sont réalisés. Son texto dit l’étendue du nouveau choc : « Dans la version de la ‘normalité’, les nouvelles ne sont pas bonnes. Pas du tout. C’est irréel. Faut pas avoir peur pour pas devenir fou. Mais Adam est en vie et c’est l’enfant de l’amour. »
Cet été, j’ai eu à vivre ça. L’arrivée du handicap dans une famille. Un événement qui éprouve fort mais aussi qui noue, qui dénoue, qui délie le cœur et les mots, qui exige de nous le meilleur. De ce temps-là, nous sortons, ma sœur et moi, plus proches que jamais. Le 26 août, Adam a fêté son premier mois.