C’est le cœur de l’été, un camping et les montagnes autour, une semaine de regroupement portée par une association : Les enfants d’abord. Nous avons choisi d’accompagner Bellaime. Elle a 13 ans et vient rejoindre ici ce qu’elle nomme sa tribu : quatre cents enfants, comme elle, non scolarisés. Une tribu sauvage et libre. On reste un peu à distance, on les observe : expérience quasi ethnographique. Ce qu’on voit ? D’abord des groupes. Qui se font, se défont, intimité des duos ou liesse des regroupements agités de fin de journée. Ensuite, ici et là, des jeux improvisés… Et puis on les entend, beaucoup et… tout le temps, se raconter, négocier, rire et parfois se fâcher fort. On sourit aussi à leurs tentatives, maladroites et tendres, de gestion démocratique via un appel à manifestation : « Ça suffit les grands qui embêtent les petits ! » Car ici oui, c’est le règne de l’affranchissement : « Marre de l’adultisme ! » « Nous aussi, on a notre mot à dire ! »
Un soir, au restaurant du camping, c’est l’heure de l’apéro. Partage entre adultes. Les enfants jouent sur la table, avec un, deux puis des monticules de cailloux. Les étaler, faire des tas, faire des chemins. Et les parents qui ne disent rien. On trouve ça un peu déplacé, mais on se tait. Le serveur semble gêné. Lui aussi se tait. Mais en nous des questions jaillissent : que laisse-t-on faire ou non aux enfants ? Sommes-nous parfois rigides parce que la bienséance ou la propreté édictent les règles ? Quels sont les cadres indispensables à poser ? Comment les distinguer de ceux qui servent surtout à renforcer notre posture d’adulte ? Et pourquoi n’intervient-on pas, nous, communauté de parents, quand le comportement de l’enfant d’un autre ne nous semble pas souhaitable ? Cet été, nous avons été encore et toujours des parents, questionnant d’abord.
Cet article fait partie du numéro 199 (→ Acheter)
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